Les voyages de Renan Luce
Si Renan Luce commence à devenir un habitué des Francofolies, il continue de savourer la magie du festival. Rencontre quelques heures avant qu’il ne partage la dernière soirée sur la grande scène du Saint-Jean d’Acre, aux côtés de Stromae et Gaëtan Roussel.
Francos Reporters : Vous êtes un habitué des Francos, appréhendez-vous toujours la grande scène ?
Renan Luce : Elle a toujours quelque chose d’impressionnant. Quand on voit toutes les merveilleuses affiches qui se sont succédées, c’est se frotter à un lieu mythique. J’ai toujours une petite appréhension particulière mais qui se mêle aussi avec les excellents souvenirs que j’ai ici. Et tout ça fait que je suis plutôt enthousiaste et que j’ai hâte de m’y retrouver. C’est pas du tout un truc paralysant, c’est quelque chose qui porte.
F.R. : Qu’est-ce qui a changé dans votre musique après votre périple en Amérique ?
R.L. : Ce voyage sur les rives du Mississippi est important dans le sens où il a été libérateur et qu’il m’a aidé à retrouver une écriture plus fluide. Ca été un truc un peu déclencheur car j’étais dans une période ou j’écrivais assez peu, je me posais trop de questions. Musicalement, il ne m’a pas vraiment influencé même si je l’ai fait sur les routes du blues. Par contre, il me reste des images très fortes de gens qui font de la musique de manière très instinctive et sans filtre entre ce qu’ils ont dans le cœur et ce qu’ils jouent. Ça m’a servi pour composer, enregistrer, ne pas se poser de questions, être vraiment dans l’instant, plus naturel ! La musique c’est ça ! Du bonheur, des émotions, des sentiments !
F.R. : On peut voir que vos clips sont très travaillés, est-ce important pour vous ?
R.L. : Bien sur que c’est important ! C’est un passage obligé. Alors tant qu’à faire, autant que je trouve du plaisir dans un truc créatif. C’est aussi un challenge, c’est quelque chose que j’aime bien faire.
F.R. : Est-ce vous qui imaginez le déroulement de la vidéo et les décors ?
R.L. : Pas toujours, ça dépend un peu des clips. Là sur le dernier Appelle quand tu te réveilles, ça revient plutôt au réalisateur qui s’appelle Laurent Seroussi, quelqu’un de particulièrement doué pour mélanger créativité et technique de tournage.
F.R. : Le thème du voyage est récurrent dans votre album, quelle est votre prochaine destination ?
R.L. : Outre la route des festivals qui va me faire beaucoup bouger cet été, je pense que ça va être l’Asie, peut-être Bali ou un truc comme ça fin août pour voir les rizières, les temples, un univers plus zen.
F.R. : Et au contraire dans quel coin du monde n’iriez-vous pas ?
R.L. : Évidemment ça dépend des contextes politiques, j’irai difficilement en ce moment en Iran, en Syrie, pour des raisons évidentes.
F.R. : De quoi ne pourriez-vous pas ou avez-vous du mal à vous passer loin de chez vous ?
R.L. : Instinctivement, je dirais ma fille qui me manque au bout de 24 heures. Si on est plus sur un objet, je choisirais mon carnet de notes. J’y écris des bribes d’idées, c’est un truc vraiment précieux. Je le garde toujours dans un coin. Il me sert quand je commence à engranger pleins de bouts d’idées, quand je veux me poser et écrire.
F.R. : Si vous étiez en Afrique, de quoi auriez-vous peur ?
R.L. : J’aurais toujours peur de passer à côté de rencontres fortes. Je connais assez peu l’Afrique et j’ai un peu ce fantasme de la rencontre inattendue avec des gens qui me marqueraient, qui me feraient vivre un bon moment. J’aurais peur de rater ça, de faire un truc de touristes classique. En voyage, j’essaie d’éviter la frustration. On a vite fait de se perdre ou de suivre les mouvements classiques et de rater les beaux chemins.
F.R. : Cette année c’est la 30ème édition des Francofolies, auriez-vous un souvenir ou une anecdote à nous raconter ?
R.L. : Un de mes plus grands souvenirs, ça a été la première fois que je suis venu. Je jouais dans une toute petite salle, la salle bleue à la Coursive. Gérard Pont, qui était déjà directeur du festival, m’a proposé de venir chanter trois chansons dans un changement de plateau sur la grande scène, juste avec une guitare. Je me suis donc retrouvé devant 12000 personnes à chanter mes premières chansons, personne ne me connaissait. C’était un moment assez dingue et très électrisant, vraiment paralysant au début, mais porté par l’énergie de ce lieu qui est magique.
Interview : Clémentine & Jessica
Photo : Timothée